La deuxième conférence des Nations unies sur les océans, très attendue, a eu lieu du 27 juin au 1er juillet à Lisbonne, au Portugal. La Conférence a rassemblé des parties prenantes de l’océan du monde entier, y compris des chefs de gouvernement, des dirigeants du secteur privé, la communauté scientifique et plus encore, pour mettre en œuvre l’Objectif de développement durable 14 pour la conservation et l’utilisation durable des océans, des mers et des ressources marines. Mercator Océan International a eu l’honneur d’accueillir et de contribuer à plusieurs événements avec des partenaires majeurs.
Des engagements pour conserver et restaurer les océans et les mers
La conférence a été introduite par une déclaration politique unanime des États membres des Nations unies : « Nous réaffirmons que le changement climatique est l’un des plus grands défis de notre temps et nous sommes profondément alarmés par les effets néfastes du changement climatique sur l’océan et la vie marine » (lire l’intégralité de la déclaration). Lors de l’ouverture de la séance plénière de la conférence, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a rappelé les pressions auxquelles sont soumis les océans, notamment l’augmentation de la température des océans, l’acidification des océans, la désoxygénation, l’élévation du niveau de la mer, la diminution de la couverture de glace polaire, les modifications de l’abondance et de la répartition des espèces marines, notamment des poissons, la diminution de la biodiversité marine, ainsi que l’érosion côtière et les phénomènes météorologiques extrêmes. Il a formulé quatre recommandations pour faire face à l’urgence océanique :
- Investir dans des économies océaniques durables pour l’alimentation et les énergies renouvelables.
- Utiliser l’océan comme modèle pour gérer les problèmes mondiaux dans l’intérêt général.
- Protéger l’océan et les personnes dont la vie et les moyens de subsistance en dépendent
- Investir dans un système d’alerte précoce pour protéger les communautés côtières.
De nombreux gouvernements se sont engagés à prendre des mesures pour faire face à l' »urgence océanique ». On notera l’engagement de l’Angola à planter 1 million de mangroves en 8 mois. La Grèce s’est engagée à créer des aires marines protégées sur 30 % de son territoire maritime et à réduire de moitié les déchets plastiques marins et de 30 % les microplastiques d’ici à 2030. Le gouvernement australien a promis près de 1,2 milliard de dollars pour préserver et restaurer la Grande Barrière de Corail au cours de la prochaine décennie. De nombreux gouvernements se sont engagés à renforcer la lutte contre la pêche INN (États-Unis, Canada, Royaume-Uni, Corome, Géorgie, Venezuela, Bénin, Espagne et autres) et à augmenter la taille de leurs aires marines protégées (Monaco, Bénin, Oman, Grèce, Israël et autres). La France a également pris position contre l’exploitation minière en eaux profondes : Le président Emmanuel Macron a déclaré que la conservation et le développement des connaissances sur ces zones – qui sont encore largement inconnues – sont les principales priorités.
Besoins de connaissances sur les océans et solutions numériques
Accroître la connaissance des océans en développant des solutions numériques a été l’un des principaux sujets abordés tout au long de la Conférence des Nations unies sur les océans, dès le premier jour, lors de l’événement organisé par Mercator Océan International en collaboration avec la COI-UNESCO, le GEMS – Océan du PNUE et la Commission européenne : « Les systèmes océaniques numériques pour soutenir et renforcer la mise en œuvre des ODD ».
L’événement a rappelé l’engagement de la Commission européenne à développer, avec le soutien et la constitution d’une organisation intergouvernementale, un jumeau numérique de l’océan. Il a réuni un large panel de conférenciers, de décideurs politiques, d’États membres de l’UE et d’experts maritimes. Tous se sont accordés sur l’importance et la volonté de proposer des solutions numériques de pointe pour lutter contre les effets du changement climatique dans le cadre de l’ODD 14.
Comme l’a déclaré Joanna Post, de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), « nous devons tisser des informations entre la science et la politique. La communauté de l’observation des océans a la possibilité d’apporter des informations directement aux décideurs et de fournir des indicateurs pour évaluer les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs en matière de changement climatique. »
Le sujet a été approfondi lors du dialogue du matin « Accroître les connaissances scientifiques et développer les capacités de recherche et le transfert des technologies marines », coprésidé par Amélie de Montchalin, ministre de la transition écologique et de la cohésion territoriale, et Franz Tattenbach, ministre costaricien de l’environnement et de l’énergie. La ministre française a souligné que la science doit sous-tendre la prise de décision politique pour la protection de l’environnement.
Lancement du Centre collaboratif de la Décennie pour la prévision des océans
Le Centre de collaboration de la Décennie pour la prévision océanique a été officiellement lancé lors du Forum de la Décennie océanique le jeudi 30 juin. Accueilli par Mercator Ocean International, le DCC OceanPrediction se concentrera principalement sur deux domaines. « Nous construirons et administrerons un forum mondial pour la communauté de la prévision océanique, et nous aurons des activités techniques qui permettront des services de prévision océanique plus nombreux et mieux intégrés pour l’avenir », explique Enrique Alvarez, coordinateur technique du Centre de collaboration de la décennie pour la prévision océanique à MOi.
Lire plus à propos du DCC OceanPrediction.
Vers une surveillance intégrée des déchets marins pour informer l’action
MOi, en tant qu’hôte du bureau européen de GEO Blue Planet par le biais du projet EU4OceanObs, en collaboration avec le GOOS, le Centre AIR et le PNUE, a organisé un événement parallèle le 29 juin 2022 à Cascais afin de promouvoir une action internationale sur la surveillance des déchets marins. Dans le contexte des objectifs de l’ODD 14.1.1 et de l’annonce de l’UNEA-5 de forger un accord international juridiquement contraignant d’ici 2024, l’événement s’est concentré sur l’observation, la télédétection et la modélisation des déchets marins en tant que piliers clés pour soutenir l’établissement d’objectifs réalistes de réduction des déchets plastiques et le développement de politiques pour atteindre ces objectifs. L’événement, qui a accueilli 86 participants de 23 pays, a également vu la participation de professionnels de l’océan en début de carrière (ECOP) par le biais de l’initiative OceanBRIDGES, un programme approuvé par la Décennie des Nations unies pour l’océan qui encourage le dialogue intergénérationnel. L’événement a permis de plaider en faveur de la nécessité d’un système intégré d’observation des débris marins (IMDOS) qui travaillera main dans la main avec le partenariat mondial du PNUE sur les déchets marins afin de combler les lacunes critiques en matière de connaissances et de répondre aux besoins des parties prenantes, notamment en soutenant la plateforme numérique.
Lire plus : https://www.eu4oceanobs.eu/marine-litter-monitoring-to-inform-action/
La nécessité d’un panel international pour la durabilité des océans (IPOS)
L’événement intitulé « The need for an International Panel for Ocean Sustainability (IPOS) » a été organisé par la Plateforme Océan Climat et soutenu par MOi. Il a permis de présenter le projet de création d’un Panel international pour la viabilité des océans (IPOS) pour l’évaluation de l’état actuel et futur de l’océan. Pierre Bahurel, directeur général de Mercator Ocean International, est intervenu pour démontrer la complémentarité des parties. Des organisations telles que MOi produisent et diffusent des connaissances sur les océans avec des organisations qui interprètent, déduisent et tirent des recommandations de ces connaissances – comme le fait le GIEC et comme le ferait IPOS – et celles qui produisent des lois, des lignes directrices et des engagements juridiques, sur la base du travail des deux précédentes. C’est le cas de la directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin » de la Commission européenne, mais aussi de l’objectif 14 des Nations unies en matière de développement durable, de la biodiversité marine des zones situées au-delà des juridictions nationales, etc.
L’océan des solutions pour lutter contre le climat et la biodiversité
Organisé par le gouvernement français et la Plateforme Océan Climat, en collaboration avec des partenaires français et internationaux, dont MOi, l’événement Ocean of Solutions to Tackle the Climate & Biodiversity s’est appuyé sur les résultats du One Ocean Summit, qui s’est tenu à Brest en février 2022. Les discussions ont porté sur les partenariats internationaux sur les aires marines protégées (AMP), la biodiversité et le changement climatique, où l’océanographie a un rôle important à jouer. Comme l’a déclaré Pierre Bahurel, la transition d’un océan numérique à un océan numérique jumeau va considérablement changer la façon dont les connaissances sur l’océan sont créées et partagées pour soutenir les ODD environnementaux.
Co-conception de la chaîne de valeur, des données à l’impact, par une approche de partenariat
L’événement co-organisé par le PNUE, la COI-UNESCO, MOi, GOOS et l‘Initiative du G7 pour l’avenir des mers et des océans avait pour but de « servir de pont ou de ‘chaînon manquant’ reliant les systèmes existants d’observation et de surveillance des océans et des côtes entre eux et avec les utilisateurs finaux et les parties prenantes afin de créer une boucle de rétroaction continue qui répond aux besoins et soutient le développement de solutions innovantes aux problèmes auxquels nos océans et nos côtes sont confrontés ». Comme l’explique Pierre Bahurel, Mercator Océan International est très engagée dans ce domaine, tant pour la Commission européenne dans le cadre du Copernicus Marine Service, que pour les Nations Unies avec le Decade Collaborative Centre OceanPrediction, où le feedback et les besoins des utilisateurs sont la base de notre service. La même approche s’applique à l’initiative du G7 sur l’avenir des mers et des océans, comme l’a expliqué Maria Hood, responsable du bureau européen du G7 FSOI chez MOi.
Les intervenants se sont accordés sur l’importance vitale de la connexion mutuelle entre la science et la politique, car elles trouvent un équilibre et s’adaptent aux défis de chaque pays ou région, qui sont très différents les uns des autres. Ainsi, le nouveau service GEMS Ocean (Global Environment Monitoring Service Ocean) que le PNUE est en train de mettre en place, présenté par Hartwig Kremer, fait de cette boucle vertueuse une condition de réussite.
Vers la prochaine conférence des Nations Unies sur les océans
Les interventions de Mercator Océan International lors de cette Conférence des Nations Unies sur les océans étaient axées sur l’amélioration du dialogue et des bonnes pratiques entre la science et la politique, en écho au One Ocean Summit qui s’est tenu à Brest, en France, en février dernier. Les trois prochaines années seront cruciales pour continuer à construire dans ce domaine, directement dans les activités du Centre de collaboration de la Décennie, du bureau européen du FSOI du G7 et dans la construction d’un Twin Ocean numérique de l’UE.
La France et le Costa Rica ont annoncé leur candidature pour accueillir la prochaine conférence des Nations unies sur les océans en 2025 en France, ce qui a été officiellement salué par Peter Thomson, envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies pour les océans. Ce sera une excellente occasion pour le MOi de mesurer l’évolution de tous ces engagements au fur et à mesure de la transformation en Organisation intergouvernementale.