Le One Planet Polar Summit s’est tenu à Paris du 8 au 10 novembre dans le cadre du Forum de Paris sur la Paix. Il marque un pas décisif dans la protection des régions polaires et glaciaires, c’est à dire de la cryosphère. Initié par le Président de la République française Emmanuel Macron et organisé par l’ambassadeur pour les pôles et les enjeux maritimes Olivier Poivre d’Arvor, cet événement a rassemblé plus de 700 chercheurs, scientifiques et décideurs politiques du monde entier pour initier un plan d’initiatives globales pour sauvegarder la cryosphère incarné par l’Appel de Paris.
La cryosphère aujourd’hui : des chiffres alarmants
La cryosphère correspond à la partie de la Terre où l’eau est présente à l’état solide, sous forme de glace ou de neige. Comme expliqué dans l’Appel de Paris pour les pôles et les glaciers, le constat des chercheurs spécialistes de la cryosphère qui ont participé au One Planet Polar Summit met en évidence l’impact alarmant du changement climatique sur ces zones essentielles, couvrant 10% de la surface terrestre. Les glaciers perdent massivement de la masse, il y a une augmentation jusqu’à quatre fois plus importante de la température de surface en Arctique par rapport à la moyenne annuelle mondiale depuis les quarante dernières années, et la glace de mer enregistre des minimas historiques. Les conséquences vont de la menace sur les manchots empereurs à l’impact sur l’alimentation en eau potable de deux milliards de personnes, notamment en Asie du Sud. La fonte des glaciers entraine également la hausse du niveau de la mer. Les experts soulignent l’urgence d’atténuer les émissions de gaz à effet de serre : « sans de rapides efforts d’atténuation au niveau mondial, les estimations supérieures des émissions de gaz à effet de serre provenant du dégel du pergélisol au cours de ce siècle pourraient réduire de manière significative notre capacité à limiter le réchauffement à 1.5 degré Celsius. »
Selon les rapports développés par les experts de Mercator Ocean International (MOi), basés sur les données du Copernicus Marine Service, la glace de mer a connu cette année une baisse globale drastique : suite la fonte des glaces importante, mais désormais habituelle au printemps dans l’Arctique se conjugue à une absence significative de croissance de glace de mer à l’automne dans l’Antarctique.
L’océan Arctique en chiffres
- Le 12 septembre 2023, l’étendue de la glace de mer de l’Arctique a atteint son minimum annuel, soit 3,9 millions de km2, c’est-à-dire 1,7 million de km2 de moins que la moyenne de 1993 à 2010, soit l’équivalent de 2,8 fois la taille de la France (métropolitaine et outre-mer).
- En septembre 2023, le volume de glace de mer arctique a atteint un record historique de 3 200 km3. Les 17 derniers minimums annuels de l’étendue de la glace de mer arctique sont également les 17 plus bas jamais observés (depuis 1979).
Informations complémentaires sur l’Océan Arctique
L’océan Antarctique en chiffres
- De juin à septembre 2023, les étendues de la glace de mer de l’Antarctique ont atteint des minimums record jamais observée par les satellites. En septembre 2023, c’est la première fois que l’étendue de la glace de mer en Antarctique est inférieure à 17 millions de km2, et ce depuis que la glace de mer est observée (1979).
- Cette année, la glace de mer antarctique a atteint son étendue maximale annuelle le 7 septembre, de 16,8 millions de km2, soit 1,9 million de km2 de moins par rapport à la moyenne 1993-2010 pour la même date. Cela correspond à une perte de glace de mer de 3 fois la taille de la France.
- En termes de volume, plus de 6 000 km3 de glace de mer antarctique ont disparu en 2023, par rapport à la moyenne entre 1993 et 2010 : l’équivalent de 67 fois le volume du lac Léman en Suisse (89 km3).
Informations complémentaires sur l’Océan Antarctique.
L’Appel de Paris, une initiative française pour une mobilisation mondiale polylatérale
Face à cette situation critique, plusieurs pays et organisations internationales[1] ont approuvé l’Appel de Paris pour les glaciers et les pôles. Cet appel réunit plusieurs engagements et actions cruciales pour la préservation de la cryosphère, dans un contexte de triple crise engendrée par le dérèglement climatique, la perte de biodiversité et la pollution. Deux points clés sont particulièrement mis en valeur : la nécessité d’approfondir la connaissance scientifique ainsi que le besoin d’amplifier les efforts internationaux.
Nous encourageons les nations et toutes les organisations concernées telles que l’Union européenne à coopérer ensemble dans le domaine scientifique, à financer en commun des programmes et des infrastructures de recherche, à partager leurs données afin de permettre à l’ensemble des pays de disposer des informations les plus récentes sur l’état de la cryosphère et de ses écosystèmes spécifiques »
L’Appel de Paris porte une mobilisation et une coopération internationales imminentes, pour approfondir la recherche, agir pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, préserver la biodiversité et appliquer des normes de durabilité pour préserver la cryosphère face aux défis du changement climatique. Il s’agit d’une mobilisation polylatérale sans précédent pour les pôles et les glaciers : comme l’explique Pascal Lamy, le président du Forum de Paris sur la Paix qui a accueilli le One Planet Polar Summit, le polylatéralisme élargit le concept traditionnel du multilatéralisme en impliquant non seulement les gouvernements, mais également une multitude d’acteurs tels que la science, les ONG, le secteur financier, et bien d’autres. Cette approche favorise la collaboration entre ces différentes entités pour résoudre des problèmes mondiaux complexes, reconnaissant ainsi la nécessité d’une participation diversifiée pour faire face aux défis contemporains à l’échelle mondiale.
Le Président de la République française Emmanuel Macron a annoncé la suite des négociations au cours d’un prochain Sommet encadré par la présidence norvégienne du Conseil de l’Arctique dans un an, et probablement lors de la Conférence des Nations Unies pour l’Océan en juin 2025, organisée conjointement par la France et le Costa Rica. « C’est par ce suivi régulier que nous pourrons continuer d’avoir des résultats concrets, » a affirmé le Président français.
L’océanographie opérationnelle au service de l’Appel de Paris
Le premier One Planet Summit s’est tenu à Paris en 2017, le Premier One Planet Ocean Summit à Brest en 2022, le premier One Planet Polar Summit en novembre 2023. Ces sommets sont tous parvenus à réaliser une vaste mobilisation internationale, éclairée par la science. Leader international de la prévision océanique et de l’océan numérique, Mercator Ocean International apporte son soutien à l’Appel de Paris pour les glaciers et les pôles et s’engage à mettre son expertise au service de la connaissance océanique des pôles, notamment pour produire des données et des indicateurs fiables et précis, comme ses bulletins pour la glace de mer (Arctique et Antarctique) publiés récemment. MOi renforcera cet engagement non seulement avec le futur Jumeau Numérique de l’Océan, en cours de conception dans le cadre de la Mission Océan de l’UE, à la demande de la Présidente de la Commission Européenne, Ursula von der Leyen, mais aussi grâce à la mobilisation sans précédent de la communauté mondiale des prévisionnistes de l’océan dans le cadre de la Décennie des Sciences de l’océan des Nations Unies (OceanPrediction Decade Collaborative Centre).
Liens utiles
- Communiqué de Presse de l’Elysée : Appel de Paris pour les glaciers et les pôles – Déclaration du One Planet-Polar Summit
- Sea Ice in the Arctic continues to decline
- Antarctic Sea Ice Reaches Lows Never Before Observed
[1] Allemagne, Australie, Bangladesh, Belgique, Bulgarie, Cap Vert, Chili, Chypre, Comores, Corée du Sud, Croatie, Espagne, Estonie, France, Guinée, Inde, Italie, Japon, Kirghizistan, Libéria, Macédoine du Nord, Monaco, Monténégro, Pakistan, Pérou, Royaume-Uni, Singapour, Suisse, Tuvalu, Ukraine, Uruguay.
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