Une nouvelle méthode combinant les flotteurs BGC-Argo et des modèles numériques élargit notre compréhension de l’océan

Mesurer la biochimie de l’océan est essentiel pour comprendre comment le changement climatique affecte la santé de cette précieuse ressource. Alors que les modèles numériques utilisés pour cette tâche deviennent de plus en plus complexes, l’évaluation de leur précision devient également plus difficile. La collaboration entre Mercator Ocean International (MOi), le Laboratoire d’Océanographie de Villefranche sur Mer et l’Institut National d’Océanographie et de Géophysique Appliquée (OGS) de Trieste a abouti à un article scientifique, décrivant une nouvelle méthode basée sur l’utilisation du machine learning et des flotteurs BGC-Argo afin d’évaluer la performance des modèles biogéochimiques.

L’article scientifique, publié dans un article de l’Union européenne des géosciences (EGU), est co-écrit par nos experts océanographes Alexandre Mignot, Elodie Gutknecht, Julien Lamouroux, et Coralie Perruche.

Modèles biogéochimiques : à quel point sont-ils précis ?  

Un modèle biogéochimique performant peut permettre d’améliorer la surveillance de la santé de l’Océan et de la biodiversité. Il s’agira, par exemple, de mieux prévoir les changements extrêmes dans la santé des océans et, éventuellement, de soutenir la production de bulletins d’alerte, utiles aux décideurs.

L’évaluation des modèles biogéochimiques est un défi. En effet, nous ne disposons pas toujours de suffisamment de données pour procéder à une évaluation approfondie. Les sources de données telles que les observations par satellite ou les données recueillies par les navires océanographiques, par exemple, peuvent ne pas être suffisamment détaillées dans le temps et dans l’espace. De la même manière, Elles peuvent ne pas fournir toutes les informations nécessaires pour évaluer dans quelle mesure les modèles représentent d’importants processus liés au climat. » C’est là où intervient l’article scientifique, qui propose une approche innovante pour relever ce défi. 

Les flotteurs BGC-Argo changent la donne

Le programme BGC-Argo apporte une réelle solution au problème en développant un réseau mondial de capteurs biogéochimiques sur les flotteurs Argo, capables de récupérer des données in situ. Ces capteurs permettent d’obtenir des données plus précises et plus fiables, tout au long de l’année et partout où les flotteurs BGC sont déployés, repoussant ainsi les limites de l’acquisition de données de qualité. La disponibilité de ce nouveau type de données est particulièrement utile pour l’évaluation des modèles. En fait, l’ensemble de données BGC-Argo contient plus d’observations que tout autre ensemble de données disponible.

D’autre part, les modèles BGC génèrent de grandes quantités de données qui peuvent être difficiles à interpréter. Pour y remédier, les scientifiques ont utilisé un algorithme de machine learning (apprentissage automatique) pour regrouper des zones similaires dans l’océan mondial sur la base de variables biogéochimiques, comme le montre l’image ci-dessous.

Renforcer les observations dans l’Arctique

L’article scientifique nous apprend que le modèle est moins précis dans les zones arctiques et antarctiques que dans les autres régions ; et souligne l’importance de maintenir des niveaux élevés d’observations in situ dans la région arctique, tout en conservant la forte densité d’observations BGC-Argo déjà établie dans l’océan Austral (également connu sous le nom de zone antarctique).

En effet, la région arctique est une zone qui pourrait bénéficier de plus d’observations BGC-Argo. Le déploiement d’un plus grand nombre de flotteurs BGC dans cette région aiderait les scientifiques à améliorer la précision du modèle. Les régions polaires sont des zones du globe où la couverture nuageuse est importante pendant la majeure partie de l’année, ce qui rend plus difficile l’obtention de données par satellite. Par conséquent, l’utilisation de mesures BGC-Argo garantirait une plus grande précision.

En résumé, les scientifiques du MOi utilisent les observations de la chlorophylle-a par satellite afin d’affiner les modèles biogéochimiques. Cependant, la couverture nuageuse empêche certaines mesures satellitaires de la chlorophylle-a dans les régions arctiques et antarctiques. Cette limitation signifie qu’en raison de la couverture nuageuse prédominante dans ces régions de haute latitude pendant une grande partie de l’année, les données satellitaires ne peuvent pas être utilisées de manière substantielle pour améliorer la précision des modèles BGC dans ces zones. Il est donc nécessaire d’utiliser d’autres sources de données pour mieux réguler ces modèles. Par conséquent, l’intégration des mesures BGC-Argo aiderait les scientifiques à affiner la précision du modèle.

Ressources utiles

A propos des auteurs

Les experts et océanographes de Mercator Océan International Alexandre Mignot, Elodie Gutknecht, Julien Lamouroux et Coralie Perruche ont rédigé l’article avec la participation d’Hervé Claustre, Gianpiero Cossarini, Fabrizio D’Ortenzio, Paolo Lazzari, Stefano Salon, Raphaëlle Sauzède, Vincent Taillandier et Anna Teruzzi.

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